Le chemin de la paix passe par Paris
Au lendemain d’Aiete, après la décision de l’ETA de cesser définitivement la lutte armée, les initiatives ont été nombreuses pour créer les conditions d’une paix juste et durable, et pour amener les États français et espagnols à discuter et à assumer leur responsabilité.
Non seulement le désarmement était un passage obligé pour dégager le chemin de paix, mais c’est surtout un désarmement qui n’humilie personne qui devrait permettre que ce chemin ne débouche sur une impasse.
En ce sens, l’action de Luhuso a enclenché un processus irréversible: rien ne sera plus comme avant!
Il fallait que le désarmement aille jusqu’au bout! Mais il fallait que cela se fasse dans des conditions qui permettront à tous et à chacun d’être en situation de construire la paix.
Le désarmement n’est donc pas simplement quelque chose de mécanique, il doit être aussi un changement de logiciel, un nouvel état d’esprit.
C’était l’objectif de la journée du 8 avril.
Et les innombrables réactions de toutes parts permettent de penser que ces objectifs ont été atteints.
Porteurs de la voix du Pays Basque
Mais, “si le désarmement permet la paix, il n’est pas encore la paix!” avions-nous proclamé ce 8 avril.
Les artisans de la paix, en Assemblée générale, ont pris deux décisions.
D’une part, la mise en place d’un groupe de travail pour réfléchir sur la question des victimes dans le respect absolu de tous; et d’autre part l’organisation d’un grand rassemblement le 9 décembre 2017 à Paris sur le thème des prisonniers.
C’est justement sur ce thème et dans cette perspective que le Pays Basque est monté à Paris le 10 juillet.
Les parlementaires, les élus représentant la transversalité politique, les artisans de la paix, les associations oeuvrant pour les droits des prisonniers, accompagnés par des personnalités de premier plan (Michel Tubiana, Serges Portelli, Louis Joynet) ont porté la voix du Pays Basque dans les différents lieux de pouvoir.
En plus de la conférence de presse tenue par l’ensemble de la délégation, pas moins de neuf réunions se sont déroulées avec le niveau exécutif (Hélenne Davo directrice adjointe de cabinet au ministère de la justice), le niveau législatif (rencontre avec Cendra Motin Vice-présidente de l’Assemblée Nationale, et les groupes parlementaires Modem, la France Insoumise, le parti communiste, d’autres groupes ayant exprimé leur accord sans pouvoir se libérer ce jour-là), ainsi que les organismes indépendants de défense des droits de l’Homme (Commission Nationale Consultative sur les Droits de l’Homme – rattachée au Premier ministre, le Défenseur des Droits, la Controleure générale des lieux de privation des libertés, et le syndicat de la magistrature).
Rapprochement des prisonniers,
libération des prisonniers gravement malades
et de tous ceux qui remplissent les conditions d’une libération anticipée…
Il faut qu’il y ait sur ces points
un changement de la politique pénitentiaire,
avec des signes clairs dès avant le 9 décembre.
Journée très positive
Sans entrer dans les détails, disons que la journée a été très positive tant par la qualité de l’écoute que par les perspectives d’avancées concrètes.
Au niveau de chaque interlocuteur, nous avons fait l’état des lieux du processus de paix depuis 2011.
Nous avons expliqué l’implication de la société civile qui permit le désarmement, et l’attente énorme de l’ensemble de la société et de ses élus dans la plus grande diversité pour un règlement définitif du conflit et de ses conséquences. Nous avons expliqué la situation des prisonniers.
Et nous avons dit très clairement: “Après le 8 avril, il nous faut l’accusé de réception!”
Et cet accusé de réception, dans l’immédiat, c’est l’abrogation de toutes les mesures d’exception appliquées aux prisonniers basques: rapprochement des prisonniers, libération des prisonniers gravement malades et de tous ceux qui remplissent les conditions d’une libération anticipée…
Il faut qu’il y ait sur ces points un changement de la politique pénitentiaire, avec des signes clairs dès avant le 9 décembre.
Nous avons eu l’intime conviction que chacun de nos interlocuteurs est bien conscient du nouveau contexte ouvert après le désarmement de l’ETA, et de la nécessité d’avancer. La question des prisonniers est prise avec sérieux par tous. Mais nous avons dit aussi que l’abolition de toutes ces mesures d’exception qui est d’une urgence absolue pratiquement six années après la fin définitive de la lutte armée, doit s’inscrire dans le cadre d’une solution globale et définitive de la question des prisonniers, et ce dans un délai raisonnable, c’est à dire dans les plus brefs délais pour les raisons évoquées ci-dessus.
Nous avons surtout expliqué que la paix était un processus interactif: le pas de l’un permettant le pas de l’autre. De pas en pas, des horizons qui étaient hier invisibles deviennent accessibles.
En ce sens, il faut admettre que les démarches à réaliser sont certes juridiques, mais pas que… Aiete – Luhuso – Baiona – Paris : le Pays Basque est sur le chemin de la paix!